Le nouvel élan de la Fan Fiction

Le 20 juillet 2011

"Pottermore", le futur site dédié à "Harry Potter," permettra peut être aux amateurs des livres de publier leur version de l'histoire. Une nouvelle reconnaissance pour les populaires "fan-fictions".

Time profite de la sortie du dernier épisode de la saga “Harry Potter” pour se pencher sur le phénomène de la fan fiction [en]. Il s’agit, comme son nom l’indique, d’une littérature amateur inspirée plus ou moins librement d’univers fictionnels populaires (romans, films, BD, jeux vidéos, etc.). Une manière de poursuivre l’histoire après le générique ou une fois les dernières pages tournées…

On apprend que le concept de “fanfic” est déjà ancien, les premiers exemples remontant aux années 60, autour de séries telles que “Des Agents très spéciaux” ou “Star Trek”. Mais c’est une fois de plus le Web 2.0 qui a catalysé ces nouvelles pratiques littéraires en simplifiant à la fois l’écriture et l’échange de textes.

Ce que je trouve impressionnant, c’est la liberté avec laquelle les fans pourtant dévoués peuvent recomposer les intrigues, dévoyer les personnages, voire remettre en cause la logique même des Å“uvres d’origine (je vous passe les détails mais les sous- et sous-sous-genres [en] de la fanfic peuvent aller très loin). Une démarche de réécriture en profondeur, qui va au-delà de l’hommage ou du pastiche et ressemble davantage à du “proto-remix”.

Écriture collaborative et démocratique

Car, si depuis Barthes l’auteur était “mort” au nom de la pluralité des interprétations, il restait la seule source de création littéraire. Un privilège qui lui échappe désormais avec la fan fiction, dont le caractère collaboratif et démocratique le transforme en simple géniteur contraint de partager la garde de ses enfants avec la communauté. Ce qui pose évidemment des problèmes de droits d’auteurs, aussi bien financier que moraux. Cependant, Lev Grossman (qui signe le reportage de Time) nous rappelle -et à juste titre- que le concept-même de droit d’auteur demeure très récent et pourrait évoluer à moyen/long terme vers plus de flexibilité.

En attendant, les stars de l’édition divergent sur l’attitude à adopter face à la fan fiction. Certains y voient un viol pur et simple de leur art, là où d’autres, comme J.K.Rowling notamment, l’encouragent. L’écrivain écossaise aurait semble-t-il prévu une section fanfic au sein de Pottermore [en], le portail officiel qui ouvrira en octobre prochain (cela dit, pas sûr qu’on y retrouve du slash…). C’est que, malgré ses bizzareries, la fanfic revient à de la promo gratuite, de la publicité à l’œil, des earned media quoi…

“Harry Potter”, grande saga de la génération remix

Néanmoins, je pense que dans le cas de Rowling, refuser la fanfic serait carrément un paradoxe, tant l’heptalogie Harry Potter est elle-même le fruit d’innombrables mélanges mythologiques, littéraires et stylistiques. On y retrouve en effet les archétypes et structures de tout grand récit qui se respecte, couplés avec des éléments empruntés au folklore et au cinéma. Sans oublier de troublants parallèles avec notre propre Histoire et le fait que l’action se déroule en parallèle du “monde réel”, et non dans quelque univers isolé dans le temps et l’espace… Véritable méta-récit, “Harry Potter” est en quelque sorte la grande saga de la génération remix. Une saga vouée à se poursuivre sous la plume de ses lecteurs devenus auteurs.


Billet initialement publié sur le blog Pocket Zeitgeist sous le titre “Harry Potter, fan fiction et génération remix”

Illustration CC FlickR PaternitéPas d'utilisation commerciale par Beacon Radio

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